La Banque mondiale au chevet des pays en guerre

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L’institution de Washington s’implique davantage pour lutter contre l’extrême pauvreté qui frappe les populations des zones de conflit.

La Banque mondiale va augmenter son aide aux pays fragiles ou touchés par des conflits qui concentrent une part croissante de la pauvreté dans le monde. Lors d’un conseil d’administration qui s’est tenu, jeudi 27 février, à Washington, l’institution a décidé de consacrer à ces pays 2,2 milliards de dollars (1,99 milliard d’euros) aux réfugiés, et 2,5 milliards de dollars au secteur privé au cours des trois prochaines années. En décembre 2019, elle avait déjà annoncé une hausse de 27 % des fonds destinés à ces pays par le biais de sa branche de l’Association internationale de développement (IDA), pour atteindre 18,7 milliards de dollars.

D’ici à la fin de l’année, la majorité des pauvres dans le monde vivront dans des pays dits « fragiles » ou « en conflit » alors qu’ils ne concentrent que 10 % de la population mondiale. Un chiffre en forte augmentation : au cours de la dernière décennie, le nombre d’habitants vivant à proximité d’un lieu de conflit a doublé, principalement en raison de la guerre en Syrie et au Yémen. Pour que les objectifs de développement durable fixés par l’Organisation des nations unies (ONU) d’ici à 2030 soient atteints, la pauvreté doit donc être combattue dans ces pays qui se trouvent principalement en Afrique et au Moyen-Orient.

« Un capital humain ravagé »

De quelle pauvreté parle-t-on ? Pas seulement du manque d’argent, mais aussi de la privation de l’accès à l’éducation ou à la santé. Autant de facteurs qui compromettent l’avenir de plusieurs générations. « Quand les armes se taisent, un conflit laisse derrière lui un capital humain ravagé, avec une productivité amoindrie, une croissance plus faible et une réduction de la pauvreté plus lente », peut-on lire dans le rapport de la Banque mondiale publié jeudi.

Dans un pays en guerre, la pauvreté est à la fois omniprésente et invisible. Aucune donnée n’existe sur près de 400 millions de pauvres qui vivent dans ces régions. La Banque mondiale veut lutter contre ce qu’elle appelle la « privation de données ».

Ainsi, en Somalie, elle a dû mettre au point une méthodologie pour enquêter sur les dépenses des ménages. En l’absence de cadastre, les zones ont d’abord été délimitées à l’aide d’images satellites mesurant la densité urbaine. Puis les questionnaires sur les dépenses des ménages ont été raccourcis au maximum pour réduire le temps passé par les enquêteurs sur le terrain et limiter les risques encourus. En l’absence de données fiables, les images satellites sont aussi utilisées pour donner une estimation de la pauvreté en fonction de la densité lumineuse, synonyme d’activité, en pleine nuit.

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Dans un tel contexte, que peut faire une banque de développement que ne font pas les humanitaires ? D’abord de la prévention, en captant les signaux faibles d’un conflit. « Il faut prêter attention aux griefs de populations qui se sentent parfois délaissées par les Etats », explique Franck Bousquet, directeur du groupe Fragilité, conflits et violence (FCV) à la Banque mondiale. L’appauvrissement alimente les tensions politiques, à l’instar des communautés du Sahel, qui font face à une raréfaction des ressources en eau ou en nourriture. L’objectif est, pendant un conflit, de protéger les institutions et les systèmes de protection sociale pour mieux préparer la reconstruction d’après-guerre. La Banque mondiale souhaite aussi soutenir le secteur privé, principal créateur d’emplois en période de conflit, en facilitant, par exemple, l’accès des petites entreprises à des lignes de crédit.

Des aides détournées

C’est la première fois que la Banque mondiale se dote d’une stratégie de réduction de la pauvreté dans les pays fragiles, même si elle y a travaillé dans le passé. Dans un monde où le paysage des conflits s’est transformé, les crises humanitaires s’installent dans la durée. « Les réfugiés peuvent rester dans des camps plus de dix ans, explique M. Bousquet. Ce n’est donc plus seulement de l’aide humanitaire dont ils ont besoin, mais des écoles et des systèmes de santé financés par les acteurs de développement. » Pour l’institution de Washington, davantage habituée à travailler dans des environnements stables en s’adossant à des gouvernements, cela nécessite de revoir ses pratiques et de renforcer ses partenariats avec les organisations humanitaires.

Le bilan de la Banque mondiale dans ce domaine est « mitigé », selon le think tank Center for Global Development, sis à Washington. Dans une note publiée en décembre 2019, il explique qu’elle doit « définir ses avantages comparatifs » pour éviter de doublonner avec les acteurs humanitaires déjà présents sur le terrain.

« Le développement et la reconstruction s’étalent sur des années, voire des décennies, alors que les ONG et les bailleurs de fond travaillent dans le court terme, parfois sans se concerter et sans aucune traçabilité de leurs aides », témoigne Lorenzo Delesgues, l’un des cofondateurs d’Integrity Watch Afghanistan. Cette ONG afghane, en partenariat avec l’entreprise française Voxmapp, est en train de mettre en place une base de données qui regroupe des dizaines de milliers de données et de photos d’infrastructures construites dans les zones reculées, pour mesurer l’efficacité de l’aide au développement.

D’autant que celle-ci est, parfois, détournée par la corruption, ou même des groupes armés. Récemment, la Banque mondiale a publié un rapport montrant que les versements d’aides vers les pays les plus dépendants coïncidaient avec une augmentation importante de transferts vers des centres financiers offshore. « Intervenir dans des situations fragiles implique de prendre davantage de risques, reconnaît M. Bousquet. Et ces risques doivent être réduits au maximum. »

In Le Monde, article réservé à nos abonnés.
Lire aussi: Une partie de l’aide au développement des pays pauvres est détournée vers les paradis fiscaux

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